La fin de l'analyse
L'idée d'une fin à l'expérience
Freud a beaucoup évolué sur la question de la fin de la cure. Au début de sa pratique, la visée de la cure était thérapeutique : il cherchait à faire disparaître les symptômes* qui faisaient souffrir. Puis, il a découvert que le manque, la souffrance, l'angoisse, la culpabilité étaient constitutifs de l'humain. En prenant appui, notamment, sur le fait que Freud lui-même reconnaissait ne pas savoir par quelle voie les fins satisfaisantes étaient obtenues, Lacan a clairement posé le problème de la fin de l'analyse*. La psychanalyse est une expérience au cours de laquelle le sujet* tire, s'il le souhaite, les conséquences d'être un être parlant.
La conséquence majeure de cette découverte est l'effacement d'une partie du lien à l'Autre* , c'est-à-dire à toute figure qui prétendrait disposer d'un savoir sur le sujet. Elle conduit à la chute du sujet supposé savoir, fin du processus de transfert*. Le sujet est rentré dans l'analyse avec un symptôme dont il souffrait et qui se présentait comme une énigme. En revendiquant de l'Autre qu'il réponde, il se mettait sous sa dépendance douloureuse. Avec la chute du sujet supposé savoir, le sujet n'attend plus de l'Autre qu'il lui donne le sens de son symptôme. Du coup, la dimension pathologique du symptôme tombe ; le symptôme reste, réduit à sa fonction : faire tenir ensemble le singulier du sujet avec l'Autre. Pour distinguer le symptôme pathologique de cette fonction nouvelle, Lacan propose de l'appeler " sinthome* ". Dès lors, le sujet découvre que ce qu'il est de plus singulier est la raison de l'échec de toute théorie qui prétendrait être valable pour tous les sujets .
La fin du transfert
Un trait qui conditionne la jouissance
A la fin de l'analyse, le sujet prend la mesure de la théorie (son fantasme*) qu'il s'est donnée pour soutenir son désir*. Il sait quel type d'objet règle ce désir (ce qui fait la singularité* de ses goûts dans tous les domaines, comme la raison de ses terreurs éventuelles). En effet, il repère dans des choses extrêmement différentes la présence du trait qui conditionne sa jouissance*. Citons comme exemple l'homme aux loups, célèbre patient de Freud, qui, à la fin de sa cure, découvre qu'il est resté marqué par la position " jambes écartées ", horrifiante à ses yeux, de sa mère. Il retrouve le V des jambes aussi bien dans le chiffre latin cinq que dans l'heure de la sieste, dans les ailes écartées du papillon qui l'effraie... et jusque dans l'élision, du fait de son accent, du W du mot Wespe (guêpe) en allemand, qui laisse apparaître ses initiales : SP, Sergueï Pankeieff ! Le V fixe à la fois ce qui lui fait horreur et, avec ses initiales, l'index symbolique où il se reconnaît .
Une escroquerie ?
En un sens, la psychanalyse est une escroquerie, puisqu'en lieu et place de l'Autre, garant de la vérité attendue, le sujet découvre l'inconsistance, voire l'inexistence, l'impossibilité d'une telle figure. Mais il y va d'une escroquerie intéressante : elle soulage de l'Autre, du poids de son regard inquisitorial et de ses tourments surmoïques. À la fin de l'analyse, le sujet s'installe dans le monde en inventant la façon de l'habiter, en réinventant ou en confirmant des solutions adoptées au cours de sa vie en fonction de son fantasme.
A la fin de la cure, le sujet découvre qu'il est une objection au savoir. Une conséquence de cette découverte est la fin de la croyance dans le sujet supposé savoir.

Analysé par un proche ?

Il n'y a pas d'objection à analyser un proche si la fonction supposé savoir est possible. Les premiers analystes ont appris à leurs dépens le risque de confusion quand eux et leurs analysants ont affaire au même discours de l'Autre du fait d'une histoire commune : ils interprétaient à partir de leur rôle dans cette histoire, de ce qu'ils en savaient de leur point de vue, et pas toujours à partir de la position du sujet supposé savoir.

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Si oui, comment savoir quand elle est finie ?
La cure a-t-elle une fin ?